Mutter Erde


Klaus der Geiger (Klaus le violoniste) est un artiste qui a mis sa science musicale, sa virtuosité, au service d’une critique sociale radicale. Il est connu en particulier pour son engagement auprès des sans-papiers, des réfugiés, des perdants du néo-libéralisme. On peut le voir et l’entendre dans les rues de Cologne et d’ailleurs, depuis plus d’un demi-siècle ! Partout où ça conteste, ça critique, ça refuse de plier, souffle l’esprit de Klaus.

Ses textes sont puissants, sans fioritures rhétoriques, sans langue de bois stylistique.

Un exemple ? En 1998, il sort Nein, nein, wie wollen nicht eure Welt (Non, non, nous ne voulons pas de votre monde), dont le refrain dit : « Non, non, nous ne voulons pas de votre monde/Nous ne voulons pas de votre pouvoir/Et nous ne voulons pas de votre argent/Nous ne voulons pas entendre parler de toutes vos duperies/Nous voulons détruire vos duperies.

Klaus der Geiger est difficilement rangeable dans un tiroir idéologique, même si les anars s’en réclament.

La chanson qui nous intéresse, Mutter Erde (Terre-mère), est sortie en 1986. La mélodie est superbe, lente, envoûtante. Le texte est d’une clarté extraordinaire et c’est justement cette simplicité, cette naïveté qui fait mouche.

Les Amérindiens disaient que la Terre n’appartient pas à l’homme, que c’est l’homme qui appartient à la Terre et Klaus der Geiger nous rappelle cette évidence cosmogonique, avec sensibilité.

Mais, la même mélodie soutient sa rage dénonciatrice du système destructeur de l’humanité, et de ceux qui le justifient, en profitent et nous l’imposent.

Dans la même chanson, amore e rabbia, amour et rage : superbe !

On est loin des mièvreries écolo-pacifistes.

Avec Arbeit Macht Frei (Protestlied de 1973) « Arbeit macht froh und Arbeit macht frei… », Klaus rejoint les critiques rares du Tripalium, comme finalité humaine. Via cette critique, les chanteurs qui ont de la classe, redonnent une perspective anti-démocratique à notre quotidien soumis au travail, redonnent du sens à notre rage sociale, redonnent vie à notre apathique existence.

Florilège de citations qui rejoignent cette optique :

– Il ne s’agit pas d’affranchir le travail, mais de le supprimer.

– Le travail est l’acte d’aliénation de l’activité humaine pratique.

– Ce à quoi on renonce dans le travail ne nous est jamais rendu.

– Le caractère étranger du travail apparaît nettement dans le fait que, dès qu’il n’existe pas de contrainte physique, le travail est fui comme la peste.

Ces citations proviennent des Manuscrits de 1844, du vieux Charlie. Pas étonnant que les léninistes aient combattu, jusqu’à notre mort, son héritage programmatique.

Klaus ne contredira pas Raoul Vaneigem, qui, dans son Traité de savoir-vivre à l’usage des jeunes générations (1967), clamait : « Une société qui abolit toute aventure fait de son abolition la seule aventure possible ».


Paroles

Erde, wir sind deine Kinder
Und alle Menschen sind dein Fleisch und Blut
Ob arm, ob alt, ob schwarz, weiß, gelb, rot
Menschen gibt es, die wollen nur haben
Und Menschen gibt es, die wollen sein
Frei sein, wie ein Vogel
Und sinnvoll wie ein Samen

Vögel fliegen über Wolken
Und über Grenzen
Samen fliegen mit dem Wind
Mutter Erde lässt sie sein und werden
Wo und wie sie sind

Aber Grenzen, das sind tiefe Gräben
Von Menschen, von wenigen Menschen
Immer und immer wieder erdacht
Und damit kontrollieren sie alles Leben
Damit sie es haben in ihrer Macht

Und sie drücken ihren Stempel
In deinen Kopf und in deinen Pass
Und erklär’n zum Verbrechen
Wenn du diesen Stempel nicht hast

Menschen, Brüder und Schwestern
Sind wir nicht mehr Mutter Erdes Kind?
Wollen frei sein, wie ein Vogel über Wolken
Und über Grenzen
Und sinnvoll wie ein Samen im Wind

Erde, wir sind deine Kinder
Und alle Menschen sind dein Fleisch und Blut
Ob arm, ob alt, ob schwarz, weiß, gelb, rot.


Terre, nous sommes tes enfants
Et tous les êtres humains sont ta chair et ton sang
Qu’ils soient pauvres, vieux, noirs, blancs, jaunes ou rouges
Il y a des gens qui veulent seulement avoir
Et il y a des gens qui veulent être
Etre libre, comme un oiseau
Et sensible comme une graine

Les oiseaux volent au-dessus des nuages
Et au-delà des frontières
Les graines volent avec le vent
La Terre Mère les laisse être et aller
Où et comme ils sont

Mais les frontières, ce sont des tombes profondes
Par des personnes, quelques personnes
Conçues encore et toujours
Afin de contrôler toute la vie
Pour qu’ils l’aient en leur pouvoir

Et ils pressent leur cachet
Dans ta tête et dans ton passeport
Et prétendent un crime
De n’avoir pas ce tampon

Frères et sœurs humains
Ne sommes-nous plus l’enfant de la Terre Mère
Ne voulons-nous pas être libres, comme un oiseau au-dessus des nuages
Et au-delà des frontières
Et sensible comme une graine dans le vent ?

Terre, nous sommes tes enfants
Et tous les êtres humains sont ta chair et ton sang
Qu’ils soient pauvres, vieux, noirs, blancs, jaunes ou rouges


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